Le principe de réalité : dans le labyrinthe de l’action sociale
Sophie Chabanel
Présentation
«Pour les sans-domicile de moins de vingt-cinq
ans, il faut s’adresser à La Passerelle. Enfin,
sauf pour les femmes avec enfant. Et sauf pour les
primo-arrivants. Et pour les familles ça dépend,
on peut aussi tenter le pôle Familles. (…) Pour
l’hébergement d’urgence, il faut absolument passer
par le 115. Malheureusement, ils sont presque
injoignables.»
Pendant deux ans, Sophie Chabanel a
travaillé pour une association d’aide au logement
à Lyon, deux ans d’immersion dans un
système débordé, où les règles contradictoires
et illisibles s’accumulent jusqu’au burlesque.
Elle y a rencontré des travailleurs sociaux
exemplaires et des bureaucrates las, des gens
exaspérés et d’autres exaspérants.
Il lui suffit de quelques détails, dans le
journal de bord qu’elle a rapporté de cette
expérience, pour saisir, avec une bienveillance
lucide qui ne s’interdit pas l’ironie, des vies
entières. Elle raconte ces mères célibataires
qui l’émeuvent, les harassantes et inutiles
réunions, ces personnes au bord d’être
renvoyées de chez elles pour une dette de
22 euros, mais aussi celles qui, pour des motifs
futiles, refusent un appartement alors qu’elles
dorment dans la rue avec des enfants. Au-delà
du chaos administratif, de sa rationalité déraisonnable,
les sentiments s’exacerbent, révélant
un malaise plus profond. Dans ce labyrinthe
de paperasserie, de numéros ajoutés les uns
aux autres, de réussites fragiles et d’échecs
nombreux, chacun de bonne foi cherche,
jusqu’à l’épuisement, le chemin de la sortie.
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